LE must

Les gras de cuisson :
tous égaux ?

Ragoût, creton, tourtière, tarte… le temps des fêtes est souvent synonyme de nourriture grasse. Nécessaires dans les recettes pour la cuisson, les corps gras apportent également un goût spécifique aux plats cuisinés. Mais sont-ils tous égaux lorsqu’on les chauffe? Et sur le plan nutritionnel, quelles sont les différences? | Par Eve Godin, nutritionniste

Gras 101

Les matières grasses se composent d’un mélange de trois types de gras : saturés, monoinsaturés et polyinsaturés. La répartition de ces derniers détermine la résistance à la chaleur, donc à la cuisson. Les produits avec des taux de gras monoinsaturés élevés (huile de canola, d’olive, etc.) ont habituellement un taux de fumée élevé les rendant propices à la friture et aux cuissons à haute température. D’un autre côté, les gras polyinsaturés (huile de maïs, de tournesol, de soya, etc.), connus pour leurs effets bénéfiques sur le cœur, sont plus fragiles aux variations de température. Les points de fumée des huiles riches en gras polyinsaturés varient beaucoup mais certaines possèdent un point élevé ce qui les rend optimales pour la cuisson.Il faut également jeter un œil sur la quantité de gras saturés dans les produits utilisés, car gras saturés riment avec « mauvais gras », gras qui causent des effets néfastes sur notre santé cardiovasculaire. Habituellement, les matières solides sont riches en gras saturés (beurre, huile de palme, etc.).

Le beurre

S’il donne bon goût aux aliments, le beurre n’est pas le corps gras de prédilection en cuisson car il a tendance à noircir rapidement lorsqu’il est chauffé entraînant la formation de radicaux libres. Il peut toutefois être incorporé dans des préparations chaudes comme les sauces et également en pâtisserie sans inconvénients et pertes de nutriments. Il n’est pas rare de voir les chefs dorer une viande dans l’huile et le beurre à la fois. L’huile abaisse le point de fumée du beurre qui noircit alors moins rapidement tout en conférant son goût unique à la recette.

La margarine

Tout comme le beurre, la margarine ne devrait pas être un corps gras à privilégier pour les cuissons même si elle possède moins de gras saturés que le beurre (même quantité de calories). Son fort contenu en eau (et encore plus élevé dans le cas des margarines légères) entraîne une réaction qui, au final, comme pour le beurre, crée la formation de radicaux libres. Ces derniers sont des composés instables qui luttent en permanence contre les antioxydants et qui peuvent mener à l’apparition de certaines maladies comme le cancer et les maladies cardiovasculaires.

Et si on démêlait les huiles?

Les huiles de pépins de raisin, de tournesol, d’arachide, de maïs et de carthame ont des points de fumée élevés les rendant intéressantes pour la cuisson. Toutefois, elles renferment des quantités élevées d’oméga-6 (un gras de la classe des polyinsaturés) que nous surconsommons dans notre alimentation. Mieux vaut opter pour l’huile de canola et l’huile d’olive qui, avec leur ratio en gras monoinsaturés élevé et leur point de fumée élevé, sont idéales pour la cuisson à la poêle ou au four.

Découvertes et nouveautés

Le beurre clarifié, dont le Beurre à cuisson de l’Académie culinaire nouvellement apparu sur nos tablettes, est du beurre auquel on a retiré le petit lait. Il a l’avantage d’être sans lactose et est idéal pour la cuisson car il ne brûle pas. Il renferme tout le goût du beurre, sans les inconvénients associés à l’amertume qui se développe si on le chauffe trop. Les Indiens utilisent depuis toujours ce même produit connu toutefois sous le nom de ghee (ou ghî).

Le beurre de cacao (ex. : de marque Mycryo) est très apprécié des grands chefs. Il s’agit du beurre de cacao transformé en poudre. Cette matière grasse 100 % végétale résiste parfaitement aux températures de cuisson élevées et peut être utilisée dans de nombreux types de cuisson comme pour les sautés, le wok et le barbecue. Le produit est coûteux (environ 20 $ les 550 g) et se trouve seulement dans certains points de vente. Pour l’utiliser, il faut enrober les produits (viande, légumes ou poisson) d’une fine couche de beurre de cacao et cuire les aliments dans une poêle chaude, sans ajout d’une autre matière grasse. Pour plus de détails, consultez le site www.mycryo.ca.

L’huile de coco ou beurre de coco est solide à la température de la pièce à cause de son contenu élevé en gras saturés. Les sportifs y voient un intérêt, car cette huile aurait des effets positifs sur le cycle de transformation des gras, ce qui permettrait de conserver les réserves de glycogène plus longtemps, améliorant les performances. Toutefois, le corps s’adapte après quelque temps et les effets finissent par s’estomper, ce qui se solde par une accumulation de gras comme avec les autres huiles. Pour ajouter un petit goût de coco à vos plats, utilisez ce produit comme le beurre ou l’huile.

Le gras de canard se situe entre le beurre et l’huile d’olive pour sa composition en gras. Il n’est pas comparable à l’huile d’olive pour ses effets positifs sur le cœur, mais peut très bien être utilisé à l’occasion, car il confère un goût unique aux aliments. Contrairement au beurre, son point de fumée est élevé; son utilisation est donc plus adéquate pour la cuisson.

Que penser des huiles en vaporisateur?

Elles sont une excellente initiative si on tente de surveiller son poids. Une petite quantité est suffisante pour couvrir une poêle, ce qui réduit considérablement la quantité de calories et de gras.

Les corps gras sont des sources élevées de calories. Le Guide alimentaire canadien recommande d’ailleurs de limiter sa consommation à de petites quantités, soit 30 à 45 ml (2 à 3 c. à soupe) par jour de gras insaturés, incluant les huiles utilisées pour la cuisson, les vinaigrettes, la margarine et la mayonnaise. Les huiles de canola et d’olive demeurent les meilleurs choix pour la cuisson.

  • Il est faut de dire que l’huile abaisse le point de fumée du beurre. En fait, ce qui brûle dans le beurre, et le fait noircir, ce sont les protéines et le lactose. L’ajout d’huile ne change rien à ce phénomène. Cela ne fait que diluer le beurre.

    La nouvelle huile de tournesol à teneur moyenne en acide oléique (qui a largement remplacée l’ancienne qui est était riche en polyinsaturés) est parfaite pour la cuisson. Idem pour une nouvelle variété de carthame, dont on a aussi réduit la teneur en polyinsaturés au profit des monoinsaturés. Ces nouvelles huiles sont facilement identifiables et disponibles dans toutes les épiceries.

    Aussi, je vous trouve un peu alarmiste au sujet de la création de radicaux libres à cause de l’eau dans le beurre et la margarine. La friture en crée autant, mais seulement lorsque l’huile est abusée.