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Mijotés - Cipaille - Cipâte - Ragoût

Cipâte, gibelotte, ragoût de boulettes… LE must vous propose de faire un petit tour du Québec en trois mijotés, en compagnie d’une experte des recettes d’autrefois… | Par Sophie Suraniti

 Voilà plus de 25 ans que Micheline Mongrain-Dontigny parcourt les régions québécoises pour colliger nos recettes traditionnelles, un inventaire culinaire qu’elle a partagé dans ses 11 livres de cuisine régionale. Passionnée, source intarissable de savoirs, mais aussi cuisinière de métier, elle nous a déniché de véritables petits trésors de famille, à la fois savoureux et réconfortants. Suivez le guide…

Ragoût de poulet et de porc de Charlevoix

Cette recette est une variante intéressante du classique ragoût de porc, avec l’ajout de poulet qui donne un goût plus délicat au bouillon. Elle puise dans nos origines françaises avec l’emploi du roux sec, à base de farine grillée, technique de liaison utilisée dans les premiers temps de la colonie. Les boulettes de viande, elles, ne sont arrivées chez nous qu’au début des années 1900, date des premiers hachoirs. Il faut savoir que les poutines à la viande, fort populaires en Mauricie, utilisent exactement la même base de ragoût. Seule différence, l’ajout de pâtes semblables à la pâte brisée, farcies de préparation à pâté à la viande (il suffit de les déposer dans le bouillon environ 20 minutes avant la fin de la cuisson).

Cipâte gaspésien

On plonge cette fois dans nos racines anglaises ! Le terme original vient d’une recette anglaise, le sea pie, qui s’est ensuite transformé en cipâte, cipaille et autres graphies ! Comme le nôtre, ce plat est constitué à base de viande. Mais où est donc passé le poisson ? Le retour d’une « pêche vide », sans prise, expliquerait cette évolution majeure : même si nos pêcheurs rentraient bredouilles, une marmite les attendait… mais pleine de viande ! Dans son livre sur les traditions culinaires d’Angleterre, Food in England (1954), l’auteure Dorothy Hartley illustre d’un beau schéma ce fameux sea pie.

Une recette fort semblable du classique cipaille québécois, avec cette technique particulière qui est de déposer de grosses cuillerées de pâte sur le plat avant de le cuire longuement au four – de nouveau, une pâte de type grands-pères mais en moins dense. Pourquoi ces ajouts de pâte ? Pour plus de portions et un mets qui « tient bien au corps » !

Gibelotte des Îles de Sorel

À l’inverse du cipâte gaspésien, la gibelotte des îles de Sorel est une recette qui a viré poisson ! La version originale telle que rapportée par Berthe Beauchemin, célèbre ménagère de la région, date de 1926. Elle était préparée avec de la sauvagine, une espèce de canard de la région. Dix ans plus tard, l’interdiction de chasser l’espèce transforme la recette : les poissons du coin (barbotte, perchaude) remplacent alors la viande. Puis la recette poursuit son évolution avec l’arrivée dans les années 50 de produits préparés, comme la soupe de crème de tomate et le maïs en crème; ces boîtes simplifient beaucoup la tâche des cuisinières ! Quant à la sarriette, herbe aromatique que l’on a un peu oubliée, elle est un incontournable dans ce type de mijotés.

RECETTES

Ragoût de poulet et de porc de Chalevoix 

Préparation : 1 H| Cuisson : 4 H | Portions : 12

« Les gens de l’Îsle-aux-Coudres sont particulièrement friands de ce ragoût. Son goût est plus doux et plus subtil qu’un ragoût préparé seulement avec du porc. On peut utiliser les pattes avant ou arrière du porc mais on obtient plus de viande avec les pattes arrière.» Micheline Mongrain-Dontigny

1 poulet entier d’environ 1 1/2 kg (3 lb) sans les abats
Environ 1 kg (2 lb) de pattes de porc
5 ml (1 c. à thé) de sel
1 ml (1/4 c. à thé) de poivre
1 gros oignon entier
10 ml (2 c. à thé) de sel
1 kg (2 lb) de porc haché
1 petit oignon haché finement
10 ml (2 c. à thé) de sel
5 ml (1 c. à thé) de poivre
1 ml (1/4 c. à thé) de cannelle moulue
90 ml (1/3 tasse) d’eau froide
Environ 250 ml (1 tasse) de farine

Placer le poulet et les pattes de porc dans un grand chaudron et recouvrir d’eau froide. Ajouter le sel et le poivre. Amener à ébullition et écumer. Ajouter l’oignon et laisser mijoter 1 heure. Enlever le poulet et continuer la cuisson encore 1 heure ou 2 jusqu’à ce que la chair du porc se détache facilement des os. Remettre le poulet dans le bouillon, amener à température pièce et placer le chaudron au réfrigérateur (une journée entière pour un meilleur résultat). Avant de poursuivre, enlever la couche de gras sur le dessus, remettre à chauffer et retirer les viandes une fois le bouillon liquéfié. Désosser le poulet et les pattes de porc. Réserver la viande au réfrigérateur.

Dans un bol, mélanger le porc, l’oignon, le sel, le poivre, la cannelle et l’eau. Façonner en boulettes. Amener le bouillon à ébullition et y ajouter les boulettes une à une. Laisser mijoter 30 minutes.

Pendant ce temps, placer la farine dans un poêlon de fonte et griller à feu moyen en brassant constamment avec le dos d’une fourchette ou une spatule en bois jusqu’à ce que la farine soit un peu plus pâle que la couleur du beurre d’arachides. Laisser refroidir.

Une fois les boulettes cuites, diluer la farine grillée dans l’eau froide et la verser en filet (consistance d’une crème épaisse) dans le ragoût. Bien mélanger et cuire 10 minutes. Laisser mijoter quelques minutes pour obtenir une belle sauce. Répéter l’opération au besoin. Ajouter la chair du poulet et les pattes de porc.

[Recette extraite du livre Délices Traditionnels du Québec]

Cipâte gaspésien

Préparation : 20 min | Cuisson : 4 h | Portions : 8 à 10

« Les gens de Charlevoix, m’ont confiée que cette même recette s’appelait aussi Ragoût de Noces à Baie-Sainte-Catherine. On peut donc penser que ce plat a probablement été transmis par un Gaspésien qui traversa la mer pour se rendre à Baie-Sainte-Catherine à moins que ce ne soit l’inverse. » Micheline Mongrain-Dontigny

1 kg (2 lb) de bœuf en cubes
8 pilons de poulet
1 morceau de lard salé carré de 11 cm (4 po) coupé en cubes de 1 cm (1/2 po)
5 petits oignons hachés
15 ml (1 c. à soupe) de base de bouillon de bœuf
30 ml (2 c. à soupe) de base de bouillon de poulet
1 ml (1/4 c. à thé) de tout-épice
4 à 6 pommes de terre pelées et taillées en cubes de 5 cm (2 po)
Pâte
500 ml (2 tasses) de farine
10 ml (2 c. à thé) de poudre à pâte
1 ml (1/4 c. à thé) de soda
2 ml (1/2 c. à thé) de sel
375 ml (1 1/2 tasse) d’eau froide

Placer le bœuf, les pilons de poulet, le lard salé et les oignons dans un grand chaudron allant au four. Couvrir d’eau et amener à ébullition. Ajouter les deux bases de bouillon et le tout-épice. Mélanger délicatement.

Ajouter les pommes de terre et ramener à ébullition. Préchauffer le four à 180 °C (350 °F).

Préparer la pâte en mélangeant la farine, la poudre à pâte, le soda et le sel. Incorporer l’eau froide jusqu’à ce que la pâte soit homogène. Laisser tomber par grosses cuillerées à soupe sur le ragoût. Couvrir et cuire au four 4 heures. Laisser reposer 1 heure. Servir.

 

[Recette extraite du livre La Cuisine Traditionnelle de Charlevoix]

Découvrez notre version végétalienne ici

 

Gibelotte des Îles de Sorel

Préparation : 15 min | Cuisson : 25 min | Portions : 4

« Un mets fort populaire durant la période estivale dans la région de Sorel. On utilise le plus souvent de la perchaude ou de la barbotte mais on peut les remplacer par n’importe quel poisson à chair blanche ferme. » Micheline Mongrain-Dontigny

2 oignons moyens hachés
1 branche de céleri
30 ml (2 c. à soupe) de beurre
250 ml (1 tasse) de bouillon de bœuf
1 ml (1/4 c. à thé) de sarriette séchée ou fraîche de préférence
Sel et poivre
4 carottes moyennes, tranchées
4 pommes de terre pelées et taillées en petits cubes
225 g (1/2 lb) de haricots verts frais
125 ml (1/2 tasse) de soupe de crème de tomate
500 g (1 lb) de filets de poisson à chair blanche
125 ml (1/2 tasse) de maïs en crème
125 ml (1/2 tasse) de petits pois congelés ou frais

Dans une grande casserole, faire revenir les oignons et le céleri dans le beurre, sans colorer, pendant 5 minutes.

Ajouter le bouillon de bœuf, la sarriette, une pincée de sel et de poivre, les carottes, les pommes de terre, les haricots verts et la crème de tomate. Laisser mijoter jusqu’à ce que les légumes soient presque cuits.

Ajouter le maïs en crème, les petits pois et le poisson. Couvrir et cuire de 5 à 10 minutes jusqu’à ce que le poisson soit cuit.

[Recette extraite du livre Délices Traditionnels du Québec]

 

À savoir

On trouve deux sortes de sarriette : celle d’été et celle d’hiver. Utilisez de préférence celle d’hiver car son goût est plus fort, plus parfumé.