Faire pousser ses propres légumes, avoir ses poules pondeuses, posséder une ruche pour produire son miel, tout ceci dans le coin de sa cour, cela peut paraître inaccessible. Effectuer un retour à la terre et réduire son empreinte écologique en produisant le plus possible ses aliments est dans l’air du temps. Avec de la patience et quelques bons filons, cette ferme peut passer du rêve à la réalité. | Par Charles Rivest, Photos : Marie-Michèle Trudeau
Les personnes qui sont attirées par ce type d’activité veulent se rapprocher de leur alimentation en utilisant des produits et des services qui sont accessibles simplement en s’étirant le bras. Quoi de plus frais que des oeufs qui viennent d’être pondus ou des légumes que l’on vient de cueillir à même le plant ?
Il existe une demande grandissante de la part des citoyens pour une agriculture de proximité. Et pourtant, selon Agriculture urbaine Montréal, jusqu’à la période industrielle, la production agricole occupait une place importante dans la plupart des villes. Depuis les années 1970, elle renaît de ses cendres. Ainsi, en ville, l’agriculture urbaine est une façon de changer le monde en produisant des aliments sains et sans produits chimiques, ainsi qu’une façon de réduire les dépenses alimentaires. Elle peut également contrer l’insécurité alimentaire.
À titre d’information, Montréal compte aujourd’hui l’un des plus importants programmes d’agriculture urbaine au monde avec plus de 8 500 parcelles réparties dans 97 jardins, 75 jardins collectifs et de nombreuses initiatives privées, sans compter que 30 % de la population du Grand Montréal (sondage Léger) dit cultiver des plantes potagères sur son terrain, balcon ou toit… Différents types de jardins existent, à commencer par
les jardins communautaires et les jardins collectifs. Depuis peu, on a aussi vu apparaître des jardins institutionnels et des jardins d’entreprises sur les
toits. Que ce soit par plaisir, pour l’environnement ou pour l’éducation, ces jardins pullulent. Nombreux sont les agriculteurs urbains qui cultivent dans leur cour arrière, sur leur balcon, ou encore grâce à un mur végétal. Voici quelques idées pour commencer votre ferme urbaine.
Dans la cour
L’idée d’un potager vous traverse l’esprit ? Le choix de son emplacement est essentiel. L’espace doit recevoir un minimum de six heures d’ensoleillement par jour et doit être dégagé. Par ailleurs, le sol doit être plat, mais bien drainé et à l’abri des grands vents. Ensuite, il faut établir sa superficie. Si c’est votre tout premier potager, vaut mieux voir plus petit. La fin de semaine de la fête des Patriotes (19 et 20 mai) est le bon moment pour semer. On opte pour une bonne terre à jardin qu’on enrichit avec du compost ou de l’engrais naturel. On aère le tout avant de planter.
Quoi planter ? La sélection doit demeurer simple et variée. Environs trois plants de chacun : tomates cerises rouges ou jaunes, poivrons rouges, concombres, carottes, laitue, chou frisé et radis sont un bon départ. Dans tous les cas, renseignez-vous et posez des questions auprès d’un spécialiste pour connaître les variétés les plus faciles et les spécificités de chacune.
Dans le coin du salon
Que ce soit pour des raisons esthétiques ou pour des raisons pratiques, les murs végétaux que l’on installe à l’intérieur de la maison peuvent être une façon intéressante d’ajouter des aliments ultra-locaux à son assiette sans avoir une ferme dans sa cour. En plus d’apporter calme et sérénité, ces jardins à la verticale permettent de diminuer les bruits ambiants et ils offrent la possibilité de cultiver une grande diversité de plantes dans un espace restreint. Si la luminosité de votre cuisine vous le permet (plein sud), rien ne vous empêche de cultiver vos fines herbes préférées dans vos modules végétaux ou dans un cadre.
Un cadre végétal intérieur installé par un spécialiste coûte de 50 $ à 125 $ le pied carré. On le fait avant tout pour le côté esthétique et pour ajouter un peu de verdure dans les plats, car dans les faits, il ne remplace pas l’achat de légumes à l’épicerie.
Abeilles citadines
La production de miel dans les milieux urbains est une activité en plein essor. Avec une quantité grandissante de jardins en ville, les abeilles sont très efficaces pour polliniser, d’où le grand intérêt qu’elles suscitent. L’apiculture est une science qui demande des connaissances de base sur la biologie de l’abeille et sur la façon dont il faut gérer une colonie. Il est nécessaire de suivre une formation ou de joindre une organisation apicole qui saura vous diriger.
Tout d’abord, sachez qu’on ne peut pas installer une ruche n’importe où. En milieu urbain, il faut s’informer avant d’installer des ruches afin d’éviter des problèmes avec son voisinage. Au Québec, il existe une réglementation provinciale minimale à respecter en ce qui a trait à la localisation des ruches abritant une colonie d’abeilles.
Il est recommandé d’éviter d’installer une ruche dans un lieu bruyant (en bordure d’une route ou d’une rue, par exemple). Par ailleurs, il faut posséder une haie d’au moins deux mètres de haut et placer la ruche à plus d’une quinzaine de mètres du voisin. Ce sont des recommandations de base, mais il y a lieu aussi de vérifier auprès de sa municipalité si les règlements en vigueur permettent la possession de ruches en activité sur le territoire. Le MAPAQ (ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec) offre gratuitement un feuillet d’information concernant les quelques règles à respecter lorsqu’on s’adonne à l’apiculture urbaine.
Une ruche et l’équipement de base coûtent environ 500$. Il existe des services d’abonnement incluant l’installation, des visites d’apprentissage et l’extraction du miel au coût de 150$ / mois. On estime un investissement de base de 700 $ à 1000 $ en équipement pour démarrer en apiculture urbaine, ce qui inclut 200 $ pour les abeilles. Si on ajoute les formations et les imprévus, le tout peut monter à plus de 3000 $.
Dans tous les cas, une ruche, dans un bon environnement, avec un bon contrôle sanitaire, donnera de 50 à 100 livres de miel pour la saison. Assez pour en avoir pour soi et même en donner aux voisins !
Faire des économies avec un potager ?
On peut récolter pour plus de 1000 $ de fruits et légumes avec un potager de 30 à 40 m2, selon Éric Duchemin, professeur à l’Institut des sciences de l’environnement de l’UQAM. Un bon jardinier peut produire cinq kilos par mètre carré à sa ferme maison.
Exemple d’une ferme urbain à la maison (pour 4 personnes)
40 m2 à la maison
Budget de départ 100$ (plants et terreau)
Productivité moyenne : 3,95 kg/m2
Total : 173 kg de fruits et légumes
Valeur moyenne sur le marché : 1244 $
Des poules sur la terrasse
Une petite omelette faite avec des oeufs que vous allez chercher au fond de la cour ? C’est on ne peut plus frais ! La garde de poules comporte un volet éducatif, alors que le fumier de poule est un excellent fertilisant pour le jardin. Durant la belle saison, les poules pondent en moyenne un oeuf tous les jours. Dès l’automne, la ponte ralentit. Au Québec, malgré nos hivers, on peut garder des poules à l’année. Il faut que le poulailler soit isolé dans ce cas. On doit aussi mettre une ampoule à infrarouges au-dessus de l’abreuvoir pour éviter que l’eau gèle. Dans tous les cas il faut s’assurer
d’être présent tous les jours.
Quel budget prévoir ? L’achat des poules pondeuses se fait auprès de fournisseurs spécialisés. Une poulette prête à pondre (19 semaines et plus) se vend aux alentours de 10$. Une poche de moulée, qui vaut moins de 15 $, nourrit une poule pendant un an environ. À titre d’exemple, pour se procurer un abri pour deux poules, on peut estimer le tout à environ 400$.
Dans tous les cas, avant de penser à installer sa ferme urbaine… Chaque municipalité réglemente ces activités. Il est conseillé de communiquer avec la sienne pour en savoir davantage sur la réglementation en vigueur. Une chose est sûre : l’idée d’avoir une ferme urbaine avec une agriculture de proximité profite à tous. Les gens qui se familiarisent avec cette activité se rapprochent de leur alimentation en utilisant des produits et des services à portée de la main.
Des liens utiles pour une ferme dans sa cour
- Planterra (planterra.ca) et La ligne verte (ligneverte.net) font partie des entreprises québécoises à confectionner des murs végétaux.
- OGarden fabrique et conçoit un système permettant de produire ses légumes soi-même dans la maison (ogarden.org).
- La compagnie Alvéole permet aux personnes qui le souhaitent de se lancer en apiculture dans une formule clés en main. (alveole.buzz)
- Pour de l’information concernant la confection de jardin : Agriculture urbaine MTL et Microhabitat (microhabitat.ca) qui se spécialise en agriculture urbaine.
Ce texte a été écrit en collaboration avec La Coop fédérée.