LE must

L’autosuffisance alimentaire,
un pari réalisable ?

Posséder un grand jardin où poussent fruits, légumes et céréales ; élever des bêtes en vue de les consommer, fabriquer son propre miel et son huile de canola, produire son propre fromage… Plusieurs caressent l’idée de vivre dans des conditions d’autosuffisance et de prendre le temps de vivre de cette façon. Un mode de vie réalisable à notre ère, où tout va vite? | Par Charline-Ève Pilon

On est bien loin du temps où l’on restait à la maison pour s’occuper à temps plein du bétail et de l’agriculture. Tous les aliments se trouvent à portée de main, à l’épicerie du coin, et l’idée d’avoir à attendre et de modifier notre alimentation selon les saisons n’est pas une option. On souhaite avoir accès aux denrées rapidement et se sustenter comme bon nous semble. Certains ont fait le pari d’arriver à consommer uniquement ce qu’ils faisaient pousser et ce qu’ils cuisinaient. Une façon de vivre qui aborde l’alimentation d’une autre façon et qui est davantage guidée par l’accessibilité aux produits.

C’est le cas de Julie Courchesne. Cette dernière fait partie de ceux qui avaient des intolérances alimentaires. Il y a quelques années, elle a décidé de contrôler davantage ce qu’elle mange. « En 2009, on a eu une grosse année. J’ai failli mourir. Ça a été un déclic pour changer des choses. J’ai commencé à me poser des questions sur ce que je mangeais. Graduellement, j’ai essayé de faire des choses plus écologiques, à manger plus sainement. Avec mon conjoint, on a commencé un grand jardin, on s’est mis à faire nos conserves. Par la suite, on a poursuivi avec nos condiments, jus, sauces et pâtes. C’est finalement devenu une passion. »

Celle qui habite une ferme, le Domaine Coquelicots, possède des poulets, une chèvre et un grand potager. Bien qu’elle ne soit pas autosuffisante à 100%, elle arrive à produire la majeure partie des aliments qui se trouvent dans son assiette. Elle concocte non seulement la plupart des choses qu’elle mange, mais aussi ses produits de consommation courante comme le savon à linge et les produits nettoyants.

Alors que son conjoint travaille quatre jours par semaine, Mme Courchesne se consacre à son entreprise à temps plein en se donnant comme mission de partager ses connaissances par le biais de cours, de formations et de conférences à travers le Québec. Et même si de l’extérieur tout peut sembler facile, ce projet ne s’est pas réalisé en claquant des doigts. Au contraire, il s’est construit graduellement au cours des sept dernières années et n’est pas fini. Pour le couple, c’est le projet d’une vie. Et à ceux qui croient ne pas avoir assez d’heures dans une journée pour se consacrer à produire leurs produits alimentaires, Mme Courchesne répond que tout est une question de gestion de temps.

« Dans la vie, n’importe qui prend une soirée pour l’épicerie ou une journée pendant le week-end pour faire ses emplettes. Vous prenez ce temps pour faire vos conserves plutôt que de faire l’épicerie. Ce n’est pas nécessairement plus long.  C’est réalisable et accessible à tous, même pour ceux qui habitent en ville!»

Une question de goût et de coût

En s’occupant de préparer ses propres aliments, Mme Courchesne sait ce qui se retrouve dans ses plats et elle fait aussi de grosses économies. Elle réussit à épargner près de 50% des coûts de son épicerie d’avant. « Nos conserves, l’année passée, nous ont permis d’épargner 190 $. On voit la différence sur notre portefeuille et notre santé. Eh oui, on essaie le plus possible d’utiliser ce que l’on a récolté, mais on ne souhaite pas se priver pour autant. Si j’ai besoin d’une tomate fraîche et que j’en n’ai pas chez moi, je vais aller à l’épicerie! »

C’est aussi une façon pour elle de se réapproprier un mode de vie qu’on a laissé tomber. « Toutes ces connaissances, ces techniques et recettes n’ont pas su être transmises. En plus, les cours d’économie familiale ont été enlevés. Notre but, c’est d’adapter ces techniques à la vie d’aujourd’hui. Maintenant les gens travaillent 40 heures, et il y a les enfants, le soccer, … C’est une autre réalité.»

Dans tous les cas, Mme Courchesne suggère d’y aller d’un projet et d’un produit à la fois. « Par exemple, commencer par faire des conserves de tomates. Le but étant d’y aller étape par étape et une fois que c’est entré dans la routine, on peut essayer d’autres choses et finir par avoir la piqûre! »