Des recherches récentes démontrent que pour certaines personnes, il est possible d’avoir un métabolisme sain malgré un surplus de poids. Mais attention, elles ne doivent pas toutes mettre leur balance au rancart ! | Par Sophie Péloquin, MSc.
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), sur une population totale de 6,8 milliards, plus d’un milliard de personnes sont en surpoids et parmi celles-ci, environ 300 millions sont obèses. Le surpoids et l’obésité inquiètent parce que, pour la vaste majorité des gens, ils sont intimement liés au développement du diabète de type 2, de l’hypertension, des maladies cardiovasculaires, et de certains types de cancers (particulièrement le cancer du sein, de la prostate et du colon).
Mais il existe dans la population des individus obèses qui défient ces statistiques et qui semblent protégés contre le développement de plusieurs de ces facteurs de risque. Ce sont les individus qu’on nomme dans le jargon médical obèses sans complications métaboliques, ou encore les obèses métaboliquement normaux.
« Ces individus ont une meilleure résistance à l’insuline que la moyenne des individus obèses, autrement dit, l’insuline, une hormone que nous produisons, est plus efficace à diminuer le taux de sucre dans le sang, explique l’endocrinologue Rémi Rabasa-Lhoret, professeur au département de médecine de l’Université de Montréal et chercheur clinicien à l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM), qui étudie le phénomène depuis 2003. Ils ont aussi un meilleur profil lipidique sanguin, c’est-à-dire que leurs taux de cholestérol et de gras dans le sang sont plus équilibrés. » De ce fait, le docteur Rémi Rabasa-Lhoret a constaté que les individus obèses métaboliquement normaux sont moins à risque de développer du diabète et des maladies cardiovasculaires.
Le chercheur et son équipe ont étudié l’alimentation de 200 femmes post-ménopausées obèses sans complication métabolique. « Nous ne comprenons pas encore tout à fait en quoi et pourquoi ces individus sont protégés », avoue le Dr Rabasa-Lhoret. Par contre, il a observé certaines choses à leur sujet. Il a constaté que ces personnes ne consomment pas moins de calories. Toutefois, elles ont tendance à mieux manger. « Celles qui avaient la meilleure alimentation d’entre toutes avaient tout de même les meilleurs profils sur le plan métabolique ! », explique le Dr Rabasa-Lhoret. Ces personnes sont aussi bien souvent plus actives dans leurs loisirs, une pratique favorisant un meilleur contrôle de la glycémie et de la pression artérielle. On ne réinvente rien…
En moyenne, les individus obèses métaboliquement normaux représenteraient environ 30 % des personnes obèses ou avec un surplus de poids. Qui font partie de ces chanceux ? Ce sont plus souvent les femmes que les hommes. L’âge jouerait aussi un rôle : plus on est jeune, plus les chances de ne pas avoir de problèmes métaboliques associés à l’obésité sont bonnes.
Mais ce qui s’est avéré particulièrement révélateur, c’est la variation dans la répartition du gras sur le corps. Bien que leur poids total soit similaire à celui des autres individus obèses, ceux présentant un meilleur bilan de santé peuvent avoir jusqu’à 49 % moins de gras abdominal.
Bref, il semblerait, comme l’affirment de plus en plus de spécialistes, que ce n’est pas tant le surpoids qui pose problème, que l’endroit où se situe la graisse sur le corps. Quant à savoir exactement ce qui expliquerait ce phénomène, le mystère n’est pas encore entièrement résolu.
Un poids normal, mais un métabolisme obèse !
À l’opposé du spectre, on discerne aussi un sous-groupe d’individus de poids normaux, mais dont le métabolisme rappelle celui d’une personne obèse; ceux-ci ont une faible sensibilité à l’insuline, leurs graisses se situent surtout au niveau de l’abdomen, et ils ont moins de masse musculaire que les individus en santé. Les recherches démontrent que ces individus sont moins actifs physiquement que les individus de poids normaux en santé et ne restreignent pas leur apport alimentaire (n’ont pas de volonté à limiter ce qu’ils mangent). « La plupart de ces individus sont jeunes (dans la trentaine) et ils ignorent totalement qu’ils ont des facteurs de risque susceptibles de leur causer des problèmes de santé, » explique le Dr Rabasa-Lhoret.
Perdre du poids est-il nécessaire ?
Certaines femmes obèses sans complications métaboliques ont été soumises à un programme de perte de poids. Bien qu’elles aient perdu quelques kilos, cette réduction du poids n’était pas accompagnée d’une amélioration additionnelle de leur métabolisme. Ces femmes ne retiraient donc pas beaucoup d’avantages – au point de vue métabolique – de la perte de poids.
Est-ce à dire qu’elles n’auraient aucun avantage à maigrir ? Loin s’en faut, selon le Dr Rabasa-Lhoret. Car, outre le métabolisme, d’autres aspects de la santé peuvent être affectés. « Le surpoids, même chez les personnes métaboliquement saines, est associé au développement de problèmes d’arthrite, de l’apnée du sommeil et même d’un manque d’estime de soi ». Cela sans mentionner les liens avec le cancer. Alors, la balance, pas trop loin !
Vous croyez faire partie de cette catégorie de gens ? C’est possible. Mais avant d’arriver à cette conclusion, une petite visite médicale s’impose ! Prise de la pression artérielle, test de tolérance au glucose, analyse du profil lipidique sanguin, et mesure du tour de taille, permettront à votre médecin d’évaluer quelques marqueurs de votre santé métabolique tout en vous donnant des balises pour vous aider à vous fixer des objectifs en vue d’améliorer votre santé. Et rappelez-vous, les motifs de santé pour perdre du poids sont nombreux.