Le prix payé pour un aliment couvre-t-il vraiment tous les coûts engendrés dans le cours de sa production? La réponse est non. Dans le plus strict respect des principes du développement durable, nos aliments devraient être vendus plus chers ; les torts causés à l’environnement, la biodiversité, l’eau et les sols devraient être pris en considération et donc ajoutés à ce prix. | Par Lionel Levac
Différents phénomènes expliquent que les prix demandés, même si le consommateur les trouve souvent élevés, ne sont que le résultat de différentes opérations structurelles, politiques et concurrentielles.
Le problème ne réside pas tout à fait dans le prix lui-même, mais dans ce qui a mené à sa fixation. Il est bon, sinon utile, de savoir que plusieurs coûts, dont les impacts sur l’environnement, ne sont pas pris en compte. Il y a aussi le contexte politique, variable selon les pays et les régions du monde. Un exemple simple : les fromages français vendus au Canada. Ils entrent sur notre marché à des prix qui sont inférieurs à leurs coûts de production. Leur pays d’origine appuie financièrement, souvent en tout cas, l’exportation et ce que l’on peut vraisemblablement nettement associer à des subventions, fera apparaître dans nos étals des produits à rabais.
Ils sont de plus en plus nombreux, économistes et politiciens, à qualifier de « subvention par les consommateurs » les prix plus élevés payés pour des produits sous gestion de l’offre. Dans un tel cas, le consommateur paie-t-il le prix réel, le coût véritable des différentes opérations ayant mené au produit final? Non, affirment les spécialistes. Le coût supplémentaire ne couvre que les frais de structure, d’organisation et de contrôle. Si le marché était « libre » ajoutent-ils, les prix seraient moindres.
Pas à n’importe quel prix
Mais revenons au développement durable. Si on enlève des prix les coûts de structure, obtiendrait-on ainsi le prix équitable, couvrant tout? Encore une fois non, parce que ce prix soumis aux « ballottements concurrentiels » ne pourrait couvrir véritablement une approche de développement durable, l’impact sur les ressources de base et sur la biodiversité n’étant pas comptabilisé.
Le développement durable c’est comme la tarte aux pommes : tout le monde aime ça, mais personne n’a la même recette. Lorsque l’on parle de développement durable dans le monde alimentaire, il ne s’agirait que de mots, que de concepts que chaque entreprise essaie de présenter de la façon la plus alléchante, la plus sympathique et la plus vendeuse. Ainsi, on réussit plus ou moins bien à placer l’entreprise et ses produits dans une position favorable sur les marchés.
Tout le monde se réclame du développement durable. Comment pourrait-il en être autrement. Qui peut se permettre, dans un espace à haut niveau de concurrence, de faire fi des préoccupations populaires ou à tout le moins de la tendance générale face à ce propos? Aucun producteur ou transformateur ne veut se placer au banc de la société et des consommateurs.
Si le développement durable n’est pour l’essentiel qu’une façade, dans le contexte où beaucoup de coûts environnementaux ne font jamais l’objet de calculs, faut-il pour autant décrier le mouvement, dénoncer ceux qui en parlent et présentent quelques réalisations louables et concrètes? Non, bien sûr. Il faut cependant être conscient qu’on est toujours loin du compte et qu’il faut en faire encore beaucoup plus pour parvenir à des productions alimentaires que la planète globale pourrait véritablement nous fournir, et ce, à très long terme. Il faut accélérer la cadence pour que la Terre continue de nous donner tout ce que nous mangeons.
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