Être en forme et en santé, maintenir un poids santé et s’alimenter correctement, voilà les principes de base d’une vie saine auxquels adhère désormais une forte proportion de la population. Chacun fixe ses objectifs avec promesse de ne pas tricher, mais il arrive qu’en cours de route, les principes tombent. Est-ce qu’une applicaton mobile peut représenter la solution? | Par Johanne Forest
Depuis quelques années, la société est obsédée par tout ce qui touche la nutrition et le bien-être. Les entreprises l’ont bien compris et ne cessent de développer de nouvelles applications mobiles en rivalisant d’imagination. On jumelle maintenant les applications à des objets connectés qui surveillent non seulement notre alimentation, mais aussi nos gestes! Dans cette ère à la «Big Brother», voici quelques objets qui pourraient changer vos habitudes.
SmartPlate: l’assiette intelligente
La SmartPlate, littéralement assiette intelligente, a été développée par Anthony Ortiz. Cet Américain a obtenu un peu plus de 100 000 $ de sociofinancement par le site Kickstarter.com. Le projet, qui fait jaser sur le web où M. Ortiz est très actif, en est à l’étape de la préproduction.
Cette SmartPlate se présente sous forme d’une assiette classique, mais divisée en trois parties. Chaque section comporte une petite caméra numérique et un capteur de poids.
Les signaux enregistrés lorsqu’on dépose les aliments dans l’assiette sont transférés sur le téléphone intelligent par wifi ou bluetooth. Une application dédiée récupère les données et les compare à celles contenues dans une base de données. L’utilisateur voit alors sur son téléphone les composantes chimiques et l’apport calorique de son assiette. D’autres données sont également générées, dont la vitesse à laquelle il mange, au fur et à mesure que l’assiette se vide.
Selon son concepteur, l’exactitude des données récoltées est de 99 %. Le logiciel de reconnaissance de la nourriture peut déjà faire des distinctions, par exemple entre le pain blanc et le pain complet. Ce logiciel s’améliorera au fur et à mesure que les gens l’utiliseront et, par conséquent, alimenteront la base de données. On annonce qu’il sera également possible de personnaliser la SmartPlate en y entrant ses données personnelles et ses objectifs.
Une fourchette connectée
Avant l’assiette intelligente il y a eu la fourchette connectée! Déjà distribuée en Europe, la 10SFork a été conçue par la compagnie française Slow Control qui s’inscrit dans le mouvement Slow Food. Vous l’aurez deviné, on veut inciter les utilisateurs à manger plus lentement pour améliorer leur santé.
On l’appelle 10SFork parce qu’elle suggère d’attendre dix secondes entre chaque mise en bouche. Si l’envie vous prend de manger plus rapidement, la fourchette vous avertit par une vibration. En téléchargeant l’application gratuite qui l’accompagne, vous pourrez aussi obtenir la moyenne de vos coups de fourchette par minute ou encore l’intervalle entre chaque bouchée, et ainsi savoir si vous mangez trop vite.
Pourquoi faut-il absolument manger lentement? Pour la santé bien sûr, car on a tendance à manger moins quand on mange lentement, mais aussi pour retrouver le simple plaisir de manger, répond son concepteur.
Pour une alimentation sans gluten
Si vous êtes de ceux qui sont intolérants au gluten, vous serez ravi de l’arrivée prochaine de Nima. Ce capteur portable a été conçu pour alerter l’utilisateur en moins de deux minutes lorsque les protéines du grain (de blé, d’orge, de seigle…) se trouvent dans son assiette. Un net avantage sur ses prédécesseurs qui prennent encore de 15 à 20 minutes à rendre leur bilan.
Le petit appareil se glisse dans le sac à main. Vous prenez un échantillon de l’aliment, le déposez dans une capsule à usage unique que vous placez ensuite dans le capteur, puis appuyez sur le bouton. Il vous répondra en affichant l’image d’un visage triste ou souriant selon le cas.
Les centaines de produits répertoriés dans la base de données s’appuient sur la nouvelle réglementation américaine. Un produit sans gluten doit en contenir moins de 20 ppm (parties par million). Dans le cas contraire, Nima fera apparaître son visage triste.
Un scanner pour aliments
TellSpec a démarré à Toronto en 2013 après avoir recueilli près de 400 000 $ en sociofinancement sur le web. Fondée par Isabel Hoffmann, l’entreprise propose TellSpec, une application mobile assortie d’un miniscanner d’aliments qui en analyse la teneur en sucre, en graisse, en protéines et en vitamines. Elle permet également de connaître la teneur calorique et de déceler certains allergènes en une seule numérisation. Elle promet encore plus de fonctions au fil du temps. Le produit cible une très large clientèle et devrait arriver sur le marché au printemps 2016.
Le principe est sensiblement le même que pour la SmartPlate, mais se base sur un minispectromètre à infrarouge comme ceux utilisés pour le contrôle de qualité dans l’industrie agroalimentaire. On scanne le produit, ce qui enregistre un spectre analysé ensuite par un algorithme hébergé sur le nuage. La composition du produit est alors envoyée sur le téléphone intelligent à partir de l’application TellSpec. La base de données répertorie déjà plus de 3000 produits.
Des réserves sur la fiabilité
Comme on l’a mentionné précédemment, plusieurs de ces applications sont issues de très jeunes entreprises qui ont souvent obtenu une partie de leur financement grâce à des campagnes sur le web. Selon Michel R. Bouchard, directeur général du Centre en imagerie numérique et médias interactifs (CIMMI), «il faut quand même être très prudent avec des projets issus du financement participatif». Il estime que 1 projet sur 20 réussit à obtenir les résultats attendus et cite, à titre d’exemple, le succès des imprimantes 3D.
Quand on l’interrroge sur la fiabilité des données obtenues d’un objet connecté comme la SmartPlate, M. Bouchard assure que la plateforme de transfert de données est généralement fiable, tout en précisant «qu’une donnée ne peut pas être plus précise que le capteur qui la mesure». Il ajoute que le risque réside dans la manière dont seront caractérisés les produits à partir desquels l’analyse sera faite.
Obtenir les données chimiques d’une pomme semble relativement simple. Encore faut-il qu’elle soit dans les mêmes conditions de maturité et de température que celles qui ont servi à élaborer la base de données. Sinon, il y a risque d’avoir une information inexacte. Qu’en sera-t-il alors d’un mets préparé? Probablement un peu plus complexe, donc plus risqué!
Toutefois, selon Michel R. Bouchard, le défi majeur, dans le cas d’un objet comme la SmartPlate, repose surtout sur la capacité de faire une analyse des besoins en fonction du profil de l’utilisateur. Est-ce un homme? Une femme? Un athlète? Une personne en surplus de poids? Un diabétique qui doit contrôler son taux de sucre? Ouf! La liste peut être longue…
L’avenir sera… connecté
Les recherches du CIMMI montrent clairement que les objets intelligents représentent un courant de fond et ce, dans tous les domaines. C’est ce qu’on appelle maintenant la technologie Smart.
Des objets connectés apparaissent régulièrement sur le marché. Certains vont connaître la gloire alors que d’autres disparaissent aussi rapidement qu’ils sont apparus.
La recherche pour cet article a permis de constater qu’il semble très complexe de développer des objets connectés dans le secteur de l’alimentation. Ce qu’on annonce en ligne lorsque l’entreprise démarre et les résultats obtenus en bout de piste constituent souvent deux réalités distinctes. L’auteure a personnellement communiqué avec SmartPlate, Tellspec et Nima pour apprendre que, dans les trois cas, la sortie des objets, annoncée pour 2015, était reportée au milieu de 2016, au mieux.
Il n’en demeure pas moins que chaque jour un pas de plus est fait vers la mise en marché d’objets qui peuvent sembler farfelus, mais qui feront probablement partie de notre quotidien demain. Si vous avez des réserves, il sera toujours possible d’attendre la version 2.0 d’un produit avant de vous le procurer!
Pour en savoir plus:
Nimasensor.com
getsmartplate.com
tellspec.com
slowcontrol.com/fr