Le sucre contribue à la texture, à la couleur et au bon goût des aliments. Bref, il est indispensable en cuisine. Pour la santé ou le poids c’est autre chose, d’où le désir de certaines personnes de le remplacer par d’autres édulcorants. Ses substituts sont-ils réellement mieux? Naturels ou artificiels, ils ne font pas l’unanimité. | Par Stéphanie Côté
« Qu’y a-t-il de mieux – ou de « moins pire » – entre un Coke régulier rempli de sucre, ou un Coke diète qui contient de l’aspartame? ». C’est la question qu’Odette se pose chaque fois qu’elle se trouve devant le réfrigérateur au dépanneur. Elle sait qu’aucune boisson gazeuse n’est bonne pour la santé, mais elle n’en boit pas souvent. À part la gomme à mâcher pour laquelle il est difficile d’éviter les édulcorants artificiels, elle ne consomme pas d’autres aliments du genre. Elle se demande d’ailleurs si elle ne devrait pas les éviter complètement. Jeanne pour sa part, ne se pose même pas la question : « Je surveille mon poids, et les substituts de sucre sont peu caloriques ». Elle achète tout en version allégée: yogourt, crème glacée, boissons gazeuses, biscuits, céréales à déjeuner, gomme à mâcher, friandises, etc. « Qu’il s’agisse de « vrai » ou de « faux » sucre, j’ai besoin de me sucrer le bec. C’est presque une drogue! ».
À elles deux, Odette et Jeanne présentent les deux côtés de la médailles des édulcorants: 1) des doutes concernant leurs effets sur la santé. 2) leur utilité, soit une saveur sucrée pour peu ou pas de calories.
Il y a édulcorant et édulcorant
Le terme « édulcorant » désigne une substance qui donne une saveur douce à un aliment, qu’il s’agisse de sucre, de sirop de maïs, de miel, d’aspartame, de sucralose, de sorbitol, etc. On l’emploi toutefois plus souvent pour parler d’un ingrédient qui donne un goût sucré, mais qui fournit moins de calories que le sucre (ou pas du tout). Les édulcorants comme l’aspartame et le sucralose ont un pouvoir sucrant jusqu’à 600 fois supérieur au sucre ordinaire. Ils ne procurent aucune calorie, soit parce qu’une infime quantité suffit ou parce que notre corps ne les digère pas. Les polyols, ou sucres alcools comme le sorbitol, le maltitol et le xylitol, ont pour leur part un pouvoir sucrant très proches du sucre. Pourquoi sont-ils intéressants alors? Parce qu’ils procurent moins de calories et font moins augmenter la glycémie que ce dernier, et parce qu’ils ne favorisent pas la carie.
Il était une fois…
Les édulcorants artificiels ne datent pas d’hier: la saccharine a été synthétisée en 1879. Au départ, elle était utilisée pour des raisons économiques, car elle coûtait moins cher que le sucre. Vers 1950 toutefois, les raisons diététiques ont pris le dessus. Puis, d’autres édulcorants ont graduellement fait leur apparition sur le marché canadien, dont: le cyclamate au cours des années 1950, l’aspartame en 1981, le sucralose en 1991 et l’acésulfame-K en 1994.
Deux édulcorants à surveiller
- Tagatose: pouvoir sucrant similaire au sucre, mais comme il n’est presque pas absorbé par le corps, il procure le tiers des calories. Le tagatose est autorisé aux États-Unis, mais il est encore peu répandu dans les aliments. Il peut causer des malaises gastro-intestinaux.
- Alitame: pouvoir sucrant 200 fois celui du sucre. Utilisé dans divers produits en Australie, Nouvelle-Zélande, Chine et Mexique. Il n’est pas encore approuvé aux États-Unis, mais le fabricant a déposé une demande auprès de la Food and drug Administration.
Sans sucre et santé?
Dans des laboratoires aux quatre coins de la planète, il existe plusieurs autres édulcorants de synthèse. S’ils peuvent traverser nos frontières au compte-goutte, c’est que Santé Canada a le mandat de les approuver avant leur mise en marché. Seuls ceux qui ont cumulé suffisamment de preuve de leur innocuité reçoivent une approbation.
Cela dit, il y en a parmi eux qui ont des effets indésirables à fortes doses ou qui suscitent la controverse parmi les scientifiques… et par ricochet, chez les consommateurs. L’aspartame est sans aucun doute celui qui a fait et fait encore couler le plus d’encre. « Je sais qu’il a fait l’objet de plusieurs études, mais je ne peux pas ignorer les détracteurs qui disent que ces études sont subventionnées et les résultats contrôlés par le fabricant Monsanto », s’inquiète Odette.
Des centaines de personnes se plaignent chaque année auprès de Santé Canada et de la Food and Drug Administration (FAD) des États-Unis au sujet de l’aspartame. Ils lui attribuent maux de tête, étourdissement, troubles de la vision, tremblements, fatigue chronique et bien d’autres maux. Or, selon les deux organismes, aucun lien de cause à effet n’a été établi. Même s’il existe une variabilité entre les individus, il y a un principe fondamental à ne pas oublier : c’est généralement la dose qui fait le poison.
À ce propos, Santé Canada s’occupe de fixer la dose journalière admissible (DJA) pour différents édulcorants. Elle correspond à la quantité, par kilogramme de poids corporel, qu’une personne pourrait consommer quotidiennement toute sa vie durant, sans ressentir d’effets secondaires. Pour l’aspartame par exemple, un adulte de 70 kg (154 lb) pourrait consommer environ 18 cannettes de boisson gazeuse diète avant d’atteindre la DJA. Même s’il consomme plusieurs produits édulcorés à l’aspartame et qu’il cuisine avec Equal, il faut vraiment que l’aspartame soit omniprésent dans son assiette pour s’approcher de la DJA. Consommé modérément, il apparaît donc inoffensif.
Cancérigènes?
Aux États-Unis, l’aspartame a été autorisé en 1974 pendant quelques mois avant d’être retiré du marché à cause de doutes à son égard. Les experts ont ré-évalué la littérature scientifique en 1980 et ont conclu qu’il n’était pas cancérigène. Régulièrement toutefois, des chercheurs reviennent sur la sellette en affirmant que ce substitut de sucre augmente les risques de cancer du cerveau. Chaque fois, leurs affirmations sont réfutées…
Si le statut de l’aspartame demeure controversé, celui de la saccharine et du cyclamate est clair et net… mais ce n’est pas positif! Ces deux édulcorants sont interdits dans les aliments en raison de leur potentiel cancérigène. Ils peuvent uniquement être vendus comme édulcorants de table, car il y a ainsi moins de risque de surdose. Petit conseil : abstenez-vous d’en consommer.
Conclusion
Les substituts de sucre rendent peut-être service aux personnes qui veulent s’offrir des petites douceurs sans soucis – et à l’industrie qui leur confectionne des produits –, mais ils ne sont pas «santé» pour autant. Ils contribuent à entretenir notre attrait pour le goût sucré et se trouvent généralement dans des aliments dont la valeur nutritive est discutable. Même les diabétiques peuvent s’en passer, selon l’Association Diabète Québec. Il est par ailleurs démontré que les gens mangent en moyenne plus lorsqu’ils optent pour un produit allégé, comme si cela fournissait l’excuse parfaite pour tout ce permettre. Utiles les édulcorants? Parfois. Indispensables? Surtout pas!
Voici des alternatives naturelles : Sucre de canne blond, doré ou brun, sucre turbinado, sucre à la démérara et sucre de canne naturel (Sucanat), sucre d’érable, miel, sirop ou malt de céréales (riz brun, blé, orge, maïs), sirop d’agave et mélasse verte
Même si certains contiennent davantage de vitamines et de minéraux, ce n’est pas une contribution importante dans le cadre général de l’alimentation. Du sucre, c’est du sucre, et il devrait être consommé avec modération.