Sauriez-vous reconnaître les ingrédients qui se trouvent sur les étiquettes des produits que vous consommez ? Une orthographe imprononçable est-elle synonyme de toxicité ? Deux expertes vous éclairent sur la question. | Par Éliane Picard-Deland dtp, msc et Virginie Barrère, phd, de l’institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (inaf), plateforme sur l’analyse des risques et l’excellence en matière de réglementation alimentaire (parera), fsaa, Université Laval
On entend souvent des médias nous recommander de ne pas manger un aliment transformé dont on ne peut pas reconnaître tous les ingrédients sur la liste. Malheureusement, cette recommandation peut être un peu réductrice et infantilisante pour le consommateur. De plus, il faut se rappeler que les entreprises alimentaires ne font pas qu’à leur tête et doivent respecter certaines exigences !
Des règles strictes
Pour aider les consommateurs à faire des choix alimentaires sains et sûrs, le Canada s’est doté de la Loi sur les aliments et les drogues, qui légifère tous les aspects qui touchent de près ou de loin les aliments. Certaines exigences en matière d’étiquetage s’appliquent à presque tous les produits alimentaires, surtout ce qui concerne la liste des ingrédients. En effet, elle doit absolument inclure tous les ingrédients contenus dans un produit, en ordre décroissant de poids. C’est-à-dire, que l’ingrédient présent en plus grande quantité se trouve au début de la liste. De plus, les constituants des ingrédients sont indiqués entre parenthèses après l’ingrédient. Par exemple, la liste des ingrédients d’un biscuit au chocolat peut contenir : cacao chocolaté (sirop de riz déshydraté, sucre de canne, liqueur de cacao, beurre de cacao, lécithine de soya, extrait de vanille).
Tout est dans l’orthographe
La façon d’écrire un ingrédient est aussi fortement réglementée. Dans le cas où des acides aminés, vitamines ou minéraux nutritifs sont ajoutés, leur nom peut changer selon leur utilité. À titre d’exemple, l’acide ascorbique peut être déclaré « acide ascorbique » ou « vitamine C ». S’il est ajouté à un aliment à titre de vitamine aux fins d’enrichissement, il sera indiqué comme « vitamine C ». En revanche, s’il est ajouté comme additif alimentaire, par exemple, comme agent de conservation, la mention « acide ascorbique » devrait se retrouver dans la liste d’ingrédients et non « vitamine C ». Ça devient mélangeant, non ? Suivant la recommandation de certaines personnes, vous pourriez être tenté de remettre sur la tablette un produit contenant de l’acide ascorbique, alors qu’il s’agit d’une vitamine.
Difficile à prononcer, mais sans danger !
Lécithine : Gras produit par le foie et qu’on retrouve naturellement dans de nombreux aliments, dans les jaunes d’oeufs et le soya.
Diacétate de sodium : Il s’agit en fait d’un vinaigre.
Thiamine : Tout comme la riboflavine (B2), la niacine (B3) et l’acide folique (B9), la thiamine est une vitamine (B1), qui doit absolument être ajoutée aux farines au Canada.
Caroténoïde : Il s’agit d’un pigment orange, qu’on trouve notamment dans les carottes.
Pectine : Il s’agit d’un sucre d’origine végétale, qu’on trouve notamment dans les parois de nombreux fruits et légumes.
Acide sorbique : C’est un acide initialement extrait des baies de sorbier, utilisé comme agent de conservation.
Caséine : Une des protéines du lait, ajoutée à certaines crèmes glacées pour les rendre plus crémeuses.
Maltodextrine : Extrait de l’amidon de blé, de maïs ou de la fécule de pomme de terre, cet additif de la famille des sucres est utilisé comme agent texturisant.
Des ingrédients plus naturels ?
Pour répondre aux demandes du consommateur, plusieurs entreprises ont lancé des produits clean label, un concept marketing, car non réglementé. C’est-à-dire que chaque entreprise choisit sa propre définition de ce qu’est le clean label. De manière générale des produits dont l’étiquette est transparente ; on comprend la méthode de fabrication et tous les ingrédients se trouvant dans le produit. Ici aussi, il faut être vigilant et apprendre quelques notions de base. Ainsi des entreprises vont choisir d’écrire, par exemple, « extrait de céleri de culture » plutôt que « nitrite ». Il faut savoir que le céleri contient naturellement du nitrate, qui se transforme en nitrite et donc remplit les mêmes fonctions.
Les additifs, ça mange quoi en hiver ?
Concernant les additifs alimentaires, qui soulèvent beaucoup d’interrogations, il existe, à ce jour, 15 listes d’additifs autorisés. Les additifs sont classés d’après leur fonction et sont présentés avec leur nom, les parties des aliments dans lesquels on les trouve, l’utilisation et les limites de tolérance. En termes de listes, on trouve notamment la liste des colorants, des agents raffermissants ou des édulcorants autorisés. Le règlement sur les aliments et les drogues indique aussi que tout additif présent dans un produit doit figurer dans au moins une des listes.
Mais comment un additif se retrouve-t-il dans ces listes et dans nos produits ? Si un fabricant souhaite ajouter un nouvel additif (non présent sur les listes) à son produit, il doit faire une demande d’autorisation et attendre une approbation de Santé Canada.
Vers un choix plus éclairé
Il est important et utile de lire la liste des ingrédients. Cela permet de vérifier si un produit contient un ingrédient particulier et de faire des choix éclairés quant aux aliments . Cet outil est également précieux pour les personnes ayant une allergie ou une intolérance alimentaire leur permettant d’éviter certains ingrédients. Dorénavant, lorsque vous lirez la liste d’ingrédients d’un produit que vous souhaitez acheter, gardez en tête que sous un nom compliqué peut se cacher un ingrédient santé.
On garde l’oeil ouvert
Demeurez attentif, puisque vous verrez apparaître dans les prochaines années certaines modifications à l’étiquetage des aliments :
- Les ingrédients à base de sucres seront tous regroupés entre parenthèses à la suite du mot « Sucres », permettant au consommateur de repérer plus facilement les sources de sucres ajoutés.
- Les colorants alimentaires seront désignés en utilisant le nom usuel qui leur est propre.