La consommation de pain fait déjà jaser depuis des décennies. Faut-il le bannir de notre alimentation, le choisir sans sucre, sans gras, multigrain, intégral, biologique, blanc ou complet ? Et plus récemment, la vague du « sans gluten » s’est imposée comme étant le plus grand opposant à la consommation de pain, le faisant même passer pour un aliment malsain. Or, qu’en est-il réellement ? | Par Hubert Cormier, nutritionniste
Tout d’abord, attardons-nous à la recette originale d’un bon pain, telle qu’on la connaît : farine, sel, levure et eau tiède. Ces ingrédients combinés nous donneront un pain maison, moelleux les premiers jours, mais qui ne se conservera pas très longtemps. Tel est le défi de l’industrie : offrir un pain savoureux qui se conservera quelques semaines.
Et désormais, comme le consommateur s’attarde de plus en plus au volet nutritionnel, les fabricants doivent proposer des pains « santé », sans matières grasses ni sucre ajouté, sans ceci et sans cela, avec plus de fibres, moins de sodium et même avec des légumes ! Bref, l’industrie de la boulangerie a beaucoup évolué et de façon positive, ces dernières années.
L’aviez-vous remarqué ?
Il y a quelque temps, on retrouvait l’appellation « sans sucre, sans gras » sur certains pains. Cela pouvait porter à confusion pour le consommateur, car plusieurs pensaient que les produits qui portaient cette mention avaient de plus belles valeurs nutritives. Dans un contexte où très peu de personnes font déjà la différence entre un sucre (lire ici : sucre ajouté) et un glucide, certains croyaient que le pain « sans sucre, sans gras » ne contenait littéralement ni glucides ni lipides, diminuant ainsi le sentiment de culpabilité souvent ressenti après la consommation de féculents.
Désormais, l’appellation a évolué et se lit comme suit : « sans sucre et sans gras ajoutés », ce qui est bien plus logique et compréhensible. Une simple visite dans l’allée des pains au supermarché vous permettra de constater que presque toutes les compagnies s’en servent pour promouvoir leurs produits.
Le pain, fabriqué à partir de diverses farines (dérivées de différentes céréales), contiendra nécessairement des glucides en raison de l’amidon qu’on y retrouve, mais pas forcément de sucres ajoutés (du sucre blanc ou autre sucre raffiné).
L’ajout de sucre dans les pains les aidera à demeurer moelleux. Selon l’Institut canadien du sucre, pendant le processus de mélange, le sucre essaie, comme les autres ingrédients, d’obtenir l’eau. La capacité du sucre à se lier à l’eau disponible retarde l’apparition du gluten, ce qui est essentiel pour obtenir un produit doux et tendre. En présence d’une trop grande formation de gluten, la pâte sera plus dure et plus rigide. En choisissant la bonne quantité de sucre dans la recette de pain, on obtient la quantité voulue de gluten et une élasticité optimale.
Finalement, un pain portant la mention « sans sucre et sans gras ajoutés » contient-il des lipides ? La réponse est oui. La farine contient naturellement de faibles quantités de matières grasses. On parle de trois grammes par portion de 250 millilitres (1 tasse). L’ajout de noix et de diverses graines augmente aussi le contenu en matières grasses de la recette. Par exemple, 1 c. à soupe de graines de lin moulues renferme près de cinq grammes de gras. On retrouve également de l’huile de soya ou d’autres huiles végétales dans la liste d’ingrédients de certains pains.
Et le sodium ?
Une tranche de pain contient environ 200 milligrammes de sodium. Or, aussi surprenant que cela puisse paraître, le pain est l’aliment qui contribue le plus à l’apport quotidien en sodium au pays, non pas parce qu’il contient beaucoup de sel par tranche, mais parce qu’il est régulièrement consommé. Ainsi, si vous mangez deux tranches de pain le matin et deux tranches de pain le midi sous forme de sandwich, vous consommez plus de sodium en un mois que si vous ne mangiez pas de pain et consommiez occasionnellement des croustilles et autres collations salées. Tout est une question de fréquence de consommation. On estime qu’au Canada, 14 % des apports quotidiens en sodium seraient attribuables à la consommation de pain. C’est donc un vrai casse-tête pour les consommateurs de choisir leur pain. Alors que certains opteront pour un pain qu’ils aiment, d’autres préféreront se tourner vers un pain nutritif correspondant à leurs critères.
En somme, le pain, bien souvent perçu de manière négative, est un aliment de base de du régime alimentaire nord-américain qui mérite d’être reconsidéré. Souvent associé à une prise de poids, porté par les fameux « 3P », le pain à lui seul ne ferait pas grossir. Certes, il faut savoir modérer ses portions. À cet égard, le Guide alimentaire canadien recommande la consommation de 6 à 8 portions de produits céréaliers par jour chez l’adulte, ce qui permet d’inclure une belle variété d’aliments comprenant le pain, les céréales, le riz et les pâtes alimentaires.
Les critères nutritionnels à considérer pour choisir le meilleur pain
(Par portion de 50 grammes ou pour 1 tranche)
- Moins de trois grammes de gras ;
- Moins de 360 mg de sodium ;
- Quatre grammes de protéines ou plus ;
- Un minimum de deux grammes de fibres alimentaires ;
- Sans gras trans, ou une quantité inférieure à 5 % des gras totaux ;
- Une belle liste d’ingrédients, idéalement la plus courte possible ;
- Des grains entiers.